La Saveur du Vivant

Approche somatique du Yoga

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Mis à jour le : mardi 12 mai 2020 09:37

#yoga #meditation #somatic #sensorialité #pleine conscience

Categorie : Bien-être

Discipline : Yoga

La Saveur du Vivant

Approche somatique du Yoga

Une situation sans précédent a émergé : le monde s’est arrêté, nous l’avons mis sur pause, tout au moins les mouvements du monde auxquels nous étions habitués se sont suspendus. La vie, elle, continue à se déployer dans les craquèlements de notre société moderne. 

 

Si peu d’entre nous avaient cru possible de vivre une telle expérience une fois dans leur vie, nous y voilà, maintenant… les théories sur les causes abondent sur les réseaux sociaux, pourtant depuis le début du confinement une question emporte ma faveur : Comment la manière dont je vis une situation peut-elle l'influencer ? 


S’orienter vers une approche somatique


Le Yoga pratiqué dans une perspective somatique peut nous libérer d’une forme d’anesthésie collective générée par le mode de vie moderne et les relations qui en découlent. Notre mental crée des histoires, des narrations multiples ; parfois celles-ci sont nécessaires, puisqu’elles vont permettre à la personne de trouver une stratégie face à la douleur, la peine, la colère, la peur, ou l’inconfort de manière générale. En tant que processus temporaire, la stratégie de s’anesthésier de notre ressenti est plutôt bienvenue si aucune autre ressource face à l’inconfort n’est disponible. Cependant, sur le long terme, cette stratégie inhibe ce qui est vivant en nous et nous empêche de vivre la vie dans toute sa saveur. 


Dans une situation de choc traumatique, de stress intense ou répété, la réponse de chacun va être différente : que ce soit la fuite, la lutte ou l’état de sidération. Dans ces 3 cas notre physiologie est affectée, que nous en soyons conscients ou pas, parfois par d’intenses contractions musculaires, ou tout au contraire une inhibition de la réponse musculaire. L’approche somatique, qui s’intéresse particulièrement aux relations dynamiques entre le corps, la conscience et l’environnement, apporte de nombreuses pistes de réflexions et outils dans le processus de résilience et la manière d’accompagner les états post-traumatiques. Cette approche nous invite à orienter notre regard vers l’intérieur, redonner une place centrale au vécu intime. 

 

Oser plonger au cœur de la sensorialité, goûter à la vie depuis notre ressenti profond nous offre la possibilité de vivre depuis un espace de choix et de plus grande liberté.


Dans une posture de yoga par exemple, la contrainte physique peut dans un premier temps générer une sensation d’enfermement ou d’inconfort dans le corps. En fréquentant consciemment cet inconfort, à travers la respiration qui elle-même offre lentement de l’amplitude à la physiologie, une profonde liberté et une qualité d’expansion peuvent émerger, même dans les positions les plus confinées. Dans le rôle actif de l’observateur, présents à nos propres sensations, nous pouvons nous réapproprier notre expérience intime face à une situation extérieure et reprendre le pouvoir sur nos vies. 

 

Comment vivre dans ce monde, sans être de ce monde ?

 

En d’autres mots ce serait une invitation à vivre depuis un autre espace, qui ne serait pas celui du monde. Même si le yoga a gagné en popularité ces dernières décennies il n’est pas pour autant certain qu’il soit célébré dans toute sa dimension. Le Yoga si nous le limitons aux postures physiques pourrait vite devenir un espace depuis lequel on renforce le processus d’identification au monde, avec celui qui agit, qui ‘performe’. Alors il va renforcer cette anesthésie et continuer à permettre aux stratégies du mental de se déployer pour ne pas sentir la vie : ni ce qui est inconfortable, ni ce qui est confortable, ni ce qui est contracté, ni ce qui est en expansion. Dans cette approche orientée sur la performance extérieure, les postures de yoga ne permettent pas à la vie de circuler en nous, ni de célébrer ce qui est vivant. Elles sont « exécutées », mises à mort dans leur essence même, que ce soit les pratiques posturales, de respiration, de concentration ou autres.


Pourtant lorsque cet état de Yoga est recherché depuis une pleine présence à ce qui est, il va permettre d'affiner la perception de la vie qui traverse sans cesse notre corps ; nous remettant ainsi en lien avec notre essence et notre véritable nature. Nous reprenons ainsi notre place au centre de l’expérience. Cette réappropriation de nos sensations aura pour conséquence une plus grande autonomie dans nos choix et notre positionnement. 

 

Pour vivre dans ce monde, sans être de ce monde, la voie du yoga nous suggère d’orienter notre attention différemment, sur les processus internes, d’oser vivre nos expériences depuis un vécu intime. Cette période offre une opportunité unique de se mettre en contact avec notre intériorité. « Rester chez soi » a été déjà pour nombreux d’entre nous une véritable ‘sadhana’ (nom communément donné aux pratiques de yoga). Nous avons pu à souhait observer la manière dont nous vivions avec nous-mêmes, la manière dont la contrainte pouvait offrir des espaces de liberté et d’expansion qui ne passent pas par les modes de vie habituels. Aujourd’hui plus que jamais, en cultivant notre dimension lunaire, nous pouvons plonger encore plus profondément à l’intérieur, et lentement (re)donner une saveur primordiale à nos vies. La dimension lunaire s’exprime par le repos, l’écoute intérieure, une véritable présence ou une présence prolongée dans les postures. Le yoga nidra et autres pratiques au sein desquelles la conscience épouse les mouvements du souffle et du corps accompagnent ce retour vers soi.


Alors même qu’une décroissance mondiale nous est offerte, la proposition du yoga serait de rester immobile, silencieux, écouter et célébrer les mouvements internes, le souffle qui nous traverse, observer nos propres guerres intérieures et les laisser se dissoudre, continuer à respirer, en conscience,et découvrir un réservoir de sensations, de qualités, de mouvements, imperceptibles et pourtant bien réels. Goûter à la globalité de l’expérience sensorielle du corps comme on goûterait aux premiers fruits du printemps.

 

Cette bascule de notre regard est souvent célébrée en Inde, par exemple par les postures inversées qui sont une des grandes spécificités des postures de yoga. Quand le regard sur le monde s’est renversé et retourné vers l’intérieur, alors la vraie vie se révèle, tout comme notre planète Terre au point mort a révélé les unes après les autres les éclosions du printemps qui passent habituellement inaperçues. 

 

L’état de yoga organise notre monde intérieur


Il est une loi incontournable : l’observation, l’écoute intérieure réorganise l’espace observé, clarifie nos eaux internes. L’absence d’intervention et la suspension de toutes les activités extérieures ont permis en quelques semaines au taux de pollution des villes de chuter, aux eaux de Venise de retrouver leur transparence et aux dauphins d’approcher à nouveau timidement du littoral. De même en laissant nos corps tranquilles, au repos, la vie peut y fleurir, la santé originelle s’y déployer à nouveau. Dans cette écoute silencieuse et immobile émerge l’état de Yoga, un état de conscience unifié qui se goûte lui-même et qui modifie la manière dont nous percevons le monde extérieur. Tout y est plus tranquille, la vie est écoutée et du coup révélée à celui qui l’observe. 

 

Cette vacance intérieure libère aussi d’anciens traumatismes ou d'un état de stress prolongé. Le système immunitaire en se régénérant se renforce. En se ressourçant on devient plus intuitif et on trouve les chemins vers ses propres résolutions intérieures. Cette auto-régulation demande de la présence, du temps, de l’immobilité et du silence. Si dans un état de stress ou de stress post-traumatique la digestion devient secondaire (par exemple inhibée au bénéfice de la fuite ou du combat), dans le repos conscient ces fonctions peuvent à nouveau se remettre en route vers un plus grand potentiel de santé.

 

En chemin dans ce déconfinement, se pose alors les questions suivantes : quel va être notre rythme ? Allons-nous offrir notre ralentissement au monde ? Allons-nous être des êtres conscients et habiter pleinement notre corps d’un rythme plus en harmonie avec celui de la nature ? Quelle présence allons-nous offrir au monde de demain ? Nous savons à présent que nous pouvons nous mettre sur pause... plus d'excuses... si nous ne reprenons pas immédiatement les transports de substitution (voiture, bus, train, avion etc.) pouvons-nous cette fois-ci prendre soin de l’unique véhicule qui nous permet de faire l'expérience de la vie sur Terre ? Ici et maintenant, quand j’inspire et quand j’expire, je ne suis pas en danger, je me dépose dans ce corps pour faire la profonde expérience d’être vivant : So Hum 


Julie Aldivina Thérond 

Instructeur en Yoga & Méditation, TCSB, Science du Prana

Co-fondatrice de Nataraj Sadhana Yoga Studies

www.connective-nimes.org

www.natarajsadhana-yoga-school.com


Un enregistrement de Yoga Nidra sur demande vous est offert sur le site internet : clarifier nos eaux intérieures


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